Pierre tombale commémorative d'école normale
Numéro d'inventaire : 2015.30.1
Type de document : pierre de consécration
Période de création : 3e quart 20e siècle
Date de création : 1954
Inscriptions :
• inscription patronymique : ANGUENOT . P/
BARRE . M/
BATARD . M/
BRETON. L/
CHERRE . M/
CLEMENT . G/
COLLIOT . C/
DELALANDE . C/
FAVRE . P/
FOUCHE .R/
GRELLIER . J/
LANGLOIS . J/
LE MARC . L/
MESLIER. B/
ROUL . L/
THOUMELIN . J/
RENON. J/
VRIGNAUD . A//
SINGOALLA 50-54
• inscription patronymique : ANGUENOT . P/
BARRE . M/
BATARD . M/
BRETON. L/
CHERRE . M/
CLEMENT . G/
COLLIOT . C/
DELALANDE . C/
FAVRE . P/
FOUCHE .R/
GRELLIER . J/
LANGLOIS . J/
LE MARC . L/
MESLIER. B/
ROUL . L/
THOUMELIN . J/
RENON. J/
VRIGNAUD . A//
SINGOALLA 50-54
Matériau(x) et technique(s) : calcaire, ardoise, mousse
Description : Monument monolithe de pierre orné d'une plaque en ardoise placée en ressaut sur laquelle sont gravées en bas le nom de la promotion et au dessus tous les noms des normaliens de la promotion 1950-54. Sur des deux faces latérales, un décor de trapèze régulier est sculpté en creux. En raison du poids, la pierre a été évidée à l'arrière, afin que les anciens normaliens puissent la porter plus aisément lors de leur voyage de retrouvailles. Une mousse a été calée à l'intérieur de la pierre pour amener certainement plus de stabilité à l'objet.
Mesures : hauteur : 44,5 cm ; largeur : 23 cm ; profondeur : 22 cm
Lieu(x) de création : Angers
Utilisation / destination : commémoration (pierre tombale réalisée par chaque nouvelle promotion d'instituteurs symbolisant leur enterrement en tant que groupe d'étudiants. Elles étaient déposées dans le jardin de l'école normale appelé "Calypso" par les étudiants de 4ème année au cours d'une cérémonie.)
Historique : A l'école normale d'Angers, la tradition voulait que chaque promotion fasse réaliser à ses soins une pierre commémorative , avec le nom de tous les élèves, qui était placée au sein du jardin, dans un espace prénommé le "cimetière Calypso". Ce jardin arboré était aussi un jardin potager, un terrain de handball. Ainsi , au cours de leur quatrième et dernière année, ils déposaient symboliquement cette stèle commémorative comme une pierre tombale, à l'occasion d'une cérémonie, devenant ainsi "les ex". Ce rite de passage marquait leur début de carrière d'instituteur. Ce rituel semble assez spécifique à l'école normale d'Angers et nous n'en avons pas trouvé trace ailleurs. Le directeur de l'école normale de cette époque était monsieur Chotard surnommé par les élèves "Le chou".
Cette promotion constituée de 18 élèves s'était prénommée Singoalla, en lien avec un film de Christian Jacque de 1949 mettant en scène une belle gitane du nom éponyme au film. D'ailleurs ce motif de gitane se retrouve sur la carte de promotion créée par Bernard Meslier (inv. 2015.30.2)
La pierre est restée dans le jardin de l'école normale jusqu'à ce que le conseil général décide de moderniser celle-ci pour accueillir également le CIO et différents bureaux des inspecteurs primaires. Ayant entendu parler de la destruction du jardin et des 25 pierres tombales , un des membres de la promo Singoalla a demandé au directeur l'autorisation de récupérer la leur. C'est ainsi qu'à partir de 1964 , les membres ont décidé de se retrouver chaque année, (sauf en 1968) à charge pour eux de ramener la pierre lors de leurs réunions, et de procéder à leur rituel (chant de geste qu'ils avaient inventé). Chaque année , un ancien normalien qui avait pour mission d'organiser la rencontre de l'année suivante se voyait confier la stèle qu'il devait garder pendant un an. Suite au décès de certains de leurs camarades et à la difficulté de se réunir , les membres ont décidé en 2014 de suspendre leurs réunions de retrouvailles et de proposer cet objet au musée national de l'Education.
Que sont devenus ces normaliens ? Cette promotion d'instituteurs s'inscrit dans son époque et leur parcours est intéressant de ce point de vue. Plusieurs sont appelés sous les drapeaux et partent en Algérie.
Guy Clément (6e sur la liste ) a commencé sa carrière comme instituteur en Anjou, comme il correspondait avec une élève d'une école normale d'Alsace (de Guebwiller) , il s'est marié et est parti en Alsace où il a fini sa carrière comme principal de collège.//
Jean Thoumelin (16e sur la liste) reçu major de sa promotion, était chargé des discours au sein de l'école normale, il poursuit sa carrière en faisant une thèse sur "La Commune de Paris ressenti en Algérie" où il se rend dans un premier temps comme moniteur au sein de colonies de vacances, appelé comme 3 autres normaliens d'Angers dont son ami Raymond Fouché. Il revient en Algérie cette fois comme appelé du contingent en 1959. Il choisit d'y revenir dans le cadre de la coopération en 1966 jusqu'en 1973 avec épouse et enfants et est instituteur près de Blida. Il reviendra en 2006 après les années noires et retrouve ses amis, instituteurs algériens et anciens élèves.//Raymond Fouché, du temps de l'école normale s'était rendu été 1954, en Algérie pour être moniteur auprès d'enfants de la Métropole, dont 80 % étaient des enfants de mineurs, puis y revient pour y passer 15 mois comme soldat.// Michel Barre (décédé), après son service militaire s'est orienté dans une carrière de gendarmerie et a fini sa carrière comme colonel.// Louis Breton a suivi ensuite l'école normale d'éducation physique et a travaillé à partir de 1964 dans différents collèges (Chantonnay en Vendée dans les années 1970, Vaucresson dans les années 1980 ). Militant de l'Education Nouvelle, il a travaillé au sein de l'APAJH de Nantes (association pour adultes et jeunes handicapés) et a participé à la création d'Handisup, association qui oeuvre en faveur de jeunes en situation de handicap , de la maternelle jusqu'au premier emploi). Il a fini sa carrière au rectorat comme chargé de mission sur ces questions liés au handicap.// Bernard Mellier a travaillé au collège de Baugé dans le Maine-et-Loire où il avait en charge le cours complémentaire entre 1955 et 1959. Son épouse était aussi une ancienne normalienne d'Auvergne. En 1959, l'inspection départemental l’invite à aller à Gennes (Val-de-Loire) pour ouvrir une classe de sixième. Il y reste 29 ans et s'investit dans la vie de cet établissement jusqu'à devenir principal et au sein de ce village , devenant élu (adjoint au maire), préparé à s'engager dans la chose publique depuis l'école normale d'Angers puisqu'ils avaient reçu aussi des cours pour tenir un secrétariat de mairie. Son intérêt pour les élèves et les familles était grand et il cherchait à défendre les intérêts des plus modestes dans un contexte où l'antagonisme était très fort en Anjou, entre école publique et école privée. Son militantisme l'a poussé à passer le permis d'autocar pour pouvoir emmener les élèves du collège, avec leurs parents en Angleterre (Somerset). //Claude Delalande est né en 1933 à Ecouflant, il va à l'école publique de garçons du village tandis que les filles se rendent à l'école privée. Il poursuite à l'école primaire supérieure de Chevrollier (Angers-devenu aujourd'hui lycée des métiers), où il existait une classe préparatoire à l'école nationale des arts et métiers d'Angers. De là , il intègre l'école normale d'Angers. Ses deux premières années d'instituteur ont lieu à Allonnes, puis il réussit à la rentrée 1956 à obtenir un poste à l'école d'Ecouflant comme directeur de classe unique. Rentrée 1957 , il réussit à être sursitaire, mais en 1958, il doit faire une préparation militaire et s'embarque en septembre 1958 pour l'Algérie au sein de l'Infanterie. Le commandant lui propose alors l'école de Warnier à Orléansville (Chlef), modeste école qui regroupe garçons et filles, soit 60 élèves qu'il dirige avec deux séminaristes comme adjoints. Il est démobilisé en 1960 pour raison de familles, car il a désormais deux enfants . Il aura passé 24 mois en Algérie. De retour à Ecouflint, il retrouve son poste et l'école est reconstruite pour accueillir plus d'élèves. A partir de 1964, il rentre comme conseiller d'opposition et reste 19 ans à la mairie. Des 25 élèves de ses débuts, l'école se développe et a 4 classes à son départ à la retraite.
Les rituels et les cérémonies attachés à leurs vies de normaliens ont contribué à renforcer l'esprit de corps, l'esprit de solidarité et d'entraide tout particulièrement entre les membres de ce groupe. Cependant dans la panoplie des rituels, certains ont rappelé pour les dénoncer, les séances violentes et humiliantes de bizutage réalisés par les normaliens de 2ème année qui calquaient leur bizutage sur celui réalisé par les étudiants de l'école nationale des Arts et Métiers considérés par les angevins comme l'élite. Leur promotion a refusé en 1955, une fois devenus 2ème année de bizuter les nouveaux. Cette fraternité témoigne des liens très forts qu'ils ont construit, amitié qui a rejailli sur les épouses au cours des années suivantes.
Cette promotion constituée de 18 élèves s'était prénommée Singoalla, en lien avec un film de Christian Jacque de 1949 mettant en scène une belle gitane du nom éponyme au film. D'ailleurs ce motif de gitane se retrouve sur la carte de promotion créée par Bernard Meslier (inv. 2015.30.2)
La pierre est restée dans le jardin de l'école normale jusqu'à ce que le conseil général décide de moderniser celle-ci pour accueillir également le CIO et différents bureaux des inspecteurs primaires. Ayant entendu parler de la destruction du jardin et des 25 pierres tombales , un des membres de la promo Singoalla a demandé au directeur l'autorisation de récupérer la leur. C'est ainsi qu'à partir de 1964 , les membres ont décidé de se retrouver chaque année, (sauf en 1968) à charge pour eux de ramener la pierre lors de leurs réunions, et de procéder à leur rituel (chant de geste qu'ils avaient inventé). Chaque année , un ancien normalien qui avait pour mission d'organiser la rencontre de l'année suivante se voyait confier la stèle qu'il devait garder pendant un an. Suite au décès de certains de leurs camarades et à la difficulté de se réunir , les membres ont décidé en 2014 de suspendre leurs réunions de retrouvailles et de proposer cet objet au musée national de l'Education.
Que sont devenus ces normaliens ? Cette promotion d'instituteurs s'inscrit dans son époque et leur parcours est intéressant de ce point de vue. Plusieurs sont appelés sous les drapeaux et partent en Algérie.
Guy Clément (6e sur la liste ) a commencé sa carrière comme instituteur en Anjou, comme il correspondait avec une élève d'une école normale d'Alsace (de Guebwiller) , il s'est marié et est parti en Alsace où il a fini sa carrière comme principal de collège.//
Jean Thoumelin (16e sur la liste) reçu major de sa promotion, était chargé des discours au sein de l'école normale, il poursuit sa carrière en faisant une thèse sur "La Commune de Paris ressenti en Algérie" où il se rend dans un premier temps comme moniteur au sein de colonies de vacances, appelé comme 3 autres normaliens d'Angers dont son ami Raymond Fouché. Il revient en Algérie cette fois comme appelé du contingent en 1959. Il choisit d'y revenir dans le cadre de la coopération en 1966 jusqu'en 1973 avec épouse et enfants et est instituteur près de Blida. Il reviendra en 2006 après les années noires et retrouve ses amis, instituteurs algériens et anciens élèves.//Raymond Fouché, du temps de l'école normale s'était rendu été 1954, en Algérie pour être moniteur auprès d'enfants de la Métropole, dont 80 % étaient des enfants de mineurs, puis y revient pour y passer 15 mois comme soldat.// Michel Barre (décédé), après son service militaire s'est orienté dans une carrière de gendarmerie et a fini sa carrière comme colonel.// Louis Breton a suivi ensuite l'école normale d'éducation physique et a travaillé à partir de 1964 dans différents collèges (Chantonnay en Vendée dans les années 1970, Vaucresson dans les années 1980 ). Militant de l'Education Nouvelle, il a travaillé au sein de l'APAJH de Nantes (association pour adultes et jeunes handicapés) et a participé à la création d'Handisup, association qui oeuvre en faveur de jeunes en situation de handicap , de la maternelle jusqu'au premier emploi). Il a fini sa carrière au rectorat comme chargé de mission sur ces questions liés au handicap.// Bernard Mellier a travaillé au collège de Baugé dans le Maine-et-Loire où il avait en charge le cours complémentaire entre 1955 et 1959. Son épouse était aussi une ancienne normalienne d'Auvergne. En 1959, l'inspection départemental l’invite à aller à Gennes (Val-de-Loire) pour ouvrir une classe de sixième. Il y reste 29 ans et s'investit dans la vie de cet établissement jusqu'à devenir principal et au sein de ce village , devenant élu (adjoint au maire), préparé à s'engager dans la chose publique depuis l'école normale d'Angers puisqu'ils avaient reçu aussi des cours pour tenir un secrétariat de mairie. Son intérêt pour les élèves et les familles était grand et il cherchait à défendre les intérêts des plus modestes dans un contexte où l'antagonisme était très fort en Anjou, entre école publique et école privée. Son militantisme l'a poussé à passer le permis d'autocar pour pouvoir emmener les élèves du collège, avec leurs parents en Angleterre (Somerset). //Claude Delalande est né en 1933 à Ecouflant, il va à l'école publique de garçons du village tandis que les filles se rendent à l'école privée. Il poursuite à l'école primaire supérieure de Chevrollier (Angers-devenu aujourd'hui lycée des métiers), où il existait une classe préparatoire à l'école nationale des arts et métiers d'Angers. De là , il intègre l'école normale d'Angers. Ses deux premières années d'instituteur ont lieu à Allonnes, puis il réussit à la rentrée 1956 à obtenir un poste à l'école d'Ecouflant comme directeur de classe unique. Rentrée 1957 , il réussit à être sursitaire, mais en 1958, il doit faire une préparation militaire et s'embarque en septembre 1958 pour l'Algérie au sein de l'Infanterie. Le commandant lui propose alors l'école de Warnier à Orléansville (Chlef), modeste école qui regroupe garçons et filles, soit 60 élèves qu'il dirige avec deux séminaristes comme adjoints. Il est démobilisé en 1960 pour raison de familles, car il a désormais deux enfants . Il aura passé 24 mois en Algérie. De retour à Ecouflint, il retrouve son poste et l'école est reconstruite pour accueillir plus d'élèves. A partir de 1964, il rentre comme conseiller d'opposition et reste 19 ans à la mairie. Des 25 élèves de ses débuts, l'école se développe et a 4 classes à son départ à la retraite.
Les rituels et les cérémonies attachés à leurs vies de normaliens ont contribué à renforcer l'esprit de corps, l'esprit de solidarité et d'entraide tout particulièrement entre les membres de ce groupe. Cependant dans la panoplie des rituels, certains ont rappelé pour les dénoncer, les séances violentes et humiliantes de bizutage réalisés par les normaliens de 2ème année qui calquaient leur bizutage sur celui réalisé par les étudiants de l'école nationale des Arts et Métiers considérés par les angevins comme l'élite. Leur promotion a refusé en 1955, une fois devenus 2ème année de bizuter les nouveaux. Cette fraternité témoigne des liens très forts qu'ils ont construit, amitié qui a rejailli sur les épouses au cours des années suivantes.
Représentations : représentation non figurative : amitié
Lien(s) URL : L'article a été rédigé au moment de la transmission de la pierre, officialisant le don. Au sein de l'article en ligne, nous accédons à une séquence vidéo où les anciens normaliens prononcent leur chant de geste, signe de leur ralliement à la promo Singoalla. :
https://www.ouest-france.fr/normandie/rouen-sur-cette-pierre-tombale-la-memoire-des-instits-4425557
https://www.paris-normandie.fr/region/une-pierre-tombale-pour-celebrer-l-enterrement-de-leur-vie-etudiante-remise-au-musee-national-de-l-education-de-rouen-HN6593119
https://www.ouest-france.fr/normandie/rouen-sur-cette-pierre-tombale-la-memoire-des-instits-4425557
https://www.paris-normandie.fr/region/une-pierre-tombale-pour-celebrer-l-enterrement-de-leur-vie-etudiante-remise-au-musee-national-de-l-education-de-rouen-HN6593119
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