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Journal scolaire Freinet. Clochettes d'Auvergne. N°31, février, 1939.

Numéro d'inventaire : 0002.02628
Type de document : travail d'élève
Éditeur : Ecole de Saint-Cirgues de Jordanne (Saint-Cirgues de Jordanne (Cantal))
Imprimeur : Ecole de Saint-Cirgues de Jordanne
Date de création : 1939
Description : Cahier agrafé jaune.
Mesures : hauteur : 210 mm ; largeur : 135 mm
Notes : Edition des grands. Mensuel. 4e année. Le gérant : M. Dage.
Articles sur l'accueil de réfugiés espagnols.
Articles sur l'habitat et l'agriculture du Cantal.

L’arrivée des réfugiés
Hier, pendant la récréation du soir, deux autobus bourrés de réfugiés espagnols se sont arrêtés à Saint-Cirgues. Quinze personnes en sont descendues. A la mairie, M. Dage les a réparties entre les familles qui avaient accepté d’en héberger. Mme Bonal a pris 4 femmes et un jeune homme. 5 femmes sont allées loger chez Mme Delpuech. M. Gilbert a recueilli trois femmes et un enfant. Un homme est parti chez un fermier du Chaumeil. Chacun d’eux portait un maigre baluchon. L’homme n’avait absolument rien. Ils étaient mal chaussés et mal vêtus. Ils faisaient piété à voir.

Lundi 6 février 1939
Mes réfugiés
Depuis le 31 janvier, mes parents hébergent quatre réfugiés espagnols : trois femmes et un enfant de quinze ans. Chacun est arrivé, portant un baluchon en toile de sac qui contenait quelques vêtements et des vivres recueillis en route : conserves, café, sucre, ails, salé, morue, lait concentré. Je comprenais difficilement leur langue. Malgré cela, ils ont pu nous expliquer qu’ils avaient beaucoup marché à pied. Dans leur pays, ils se chauffaient au fourneau, avec du charbon. L’âtre auvergnat a eu l’air de les étonner. Ils étaient fatigués : l’une des femmes est allée au lit en arrivant. Depuis, elle est malade : hier, une ambulance l’a conduite à l’hôpital d’Aurillac. Ces réfugiés sont gentils, travailleurs et propres.
Antonin Gibert

Les malheurs de mes réfugiés
Cinq réfugiés espagnols sont venus loger chez nous : quatre femmes et un garçon de 16 ans. Mais, vendredi dernier, l’enfant est parti à l’hôpital d’Aurillac car la famine et la misère l’avaient rendu malade. Les 4 femmes sont travailleuses et propres. Nieves a 23 ans, Ramona et Maria 22 ans et Marcela 36 ans. Nous les comprenons assez bien car l’une d’elles a un peu étudié le Français. Elles nous ont raconté leurs misères en Espagne et leur passage en France.
A Barcelone, quand elles entendaient mugir les sirènes, elles se réfugiaient dans les caves. Si elles n’avaient pas le temps de se sauver, elles s’étendaient par terre. Des gens sautaient par les fenêtres et venaient s’écraser sur le sol. Quand les bombes éclataient, elles causaient d’affreux massacres. Les gens ressortaient dès que la sirène annonçait qu’il n’y avait plus de danger. Des personnes étaient tuées et avaient un bras projeté d’un côté, une jambe d’un autre et le corps tout déchiqueté par les éclats. Pendant de longues heures, la population gardait dans les oreilles, le bruit des bombes. Voyant que la guerre ne cessait pas et que les ennemis avançaient, les réfugiés se décidèrent à venir en France. Ils sont venus à pied de Barcelone à la frontière qu’ils franchirent au col du Perthus. Ils avaient emporté tout ce qu’ils pouvaient, mais, très fatigués, ils furent obligés de jeter les paquets les plus lourds. En quittant leur foyer, ils pensaient marcher tranquillement mais des avions les suivaient toujours et leur jetaient des bombes. Alors, ils se couchaient par terre. Un jour, en sautant d’un camion en marche pour échapper à la mort, 2 enfants tombèrent sous les roues et furent écrasés. Après une marche de 200 km, ils arrivèrent en France où ils furent accueillis par de Sénégalais qui avaient un anneau au nez. Ces soldats leur disaient : « Allez, allez ! Vite, vite ! ». A Perpignan, ils prirent le train qui les amena à Aurillac.
Jean Bonai
Ce que nous pensons
Léon : Ce sont des malheureux. Lorsqu’ils reviendront chez eux, ils trouveront leur maison démolie.
Etienne : on a bien fait de les accueillir et d’avoir eu pitié de leurs malheurs.
Jean : les plus à plaindre sont ceux qui ne retrouveront jamais leur mari, leur père, leur fils, leur frère.
Tous : nous ne souhaitons pas de pareilles horreurs pour notre pays
Niveau : non précisée
Nom de la commune : Saint-Cirgues-de-Jordanne
Nom du département : Cantal
Langue : Français
Nombre de pages : 16
Mention d'illustration
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